France, seconde moitié du XVIIIème siècle
Par Thomas Compigné
Etain, or et gouache
Ce petit médaillon, en feuille d’étain estampée et rehaussée d’or sur un fond d’écaille, représente une vue du château de Versailles. Dans la partie inférieure de celui-ci est inscrit : Vue du château de Versailles, prise de l’avenue de Paris, exécutée sur le Tour, Par Compigné, Tabletier du Roi.
Le château de Versailles est représenté depuis la place d’Armes et l’on distingue les deux cours successives, cour des ministres puis cour royale délimitées chacune par une grille ouverte en son centre par de large portails et aboutissant dans leur axe à la cour de marbre.
De part et d’autre, l’architecture du château est représentée telle qu’elle était dans la seconde moitié du XVIIIème siècle et est parvenue pratiquement identique jusqu’à nous à l’exception de quelques éléments ajoutés au XIXème siècle.
Ainsi, au premier plan se trouvent deux bâtiments sur de hauts soubassements en pierre à refend correspondant aux ailes des ministres encadrent la cour des ministres.
Dans le prolongement de l’aile Nord des ministres (à droite), la chapelle royale, dont la toiture dépasse du reste du bâtiment, se détache sur le ciel gouaché aux teintes rosées et bleues.
Une deuxième grille délimite la seconde cour, nommée cour royale. Elle concentre les parties les plus anciennes du château datant de l’époque de Louis XIII, centrées sur ce qui était devenu sous Louis XIV la chambre du Roi, correspondant au premier étage du corps de logis central marqué par la présence d’un balcon.
Encadrant la cour de marbre, une succession de corps de logis aux toitures distinctes s’achève au niveau de la grille par deux hauts pavillons à ordonnance parfaitement symétrique à colonnades sur soubassement à refends.
La scène est animée de personnages déambulant sur la place d’arme et cour des ministres ainsi que de cavaliers et de carrosses.
Les tableaux en Compigné
D’une grande préciosité et variété de matériaux, les tableaux en Compigné étaient réalisés selon un procédé mystérieux à partir d’une feuille d’écaille de tortue ou de papier cartonné sur laquelle était appliquée une feuille d’étain ou d’or. La surface pouvait ensuite être décorée à l’or, à l’argent, à la gouache et aux vernis colorés. Ces « miniatures » connues aujourd’hui sous le nom de Compigné, eurent un très grand succès dans les années 1760. Le petit format, caractéristique de cette production, nécessitait de travailler avec une extrême précision, probablement à l’aide d’une loupe, pour développer le perfectionnement des détails techniques et des coloris.
Thomas Compigné
Arrivé d’Italie probablement vers 1750, Thomas Compigni prit le nom de Compigné en s’installant à l’enseigne du Roi David, rue Greneta à Paris. En tant que tabletier, il était spécialisé dans la fabrication et la vente de boîtes, de jeux de trictrac, de dames et d’échecs, de tabatières et autres poignées de canne en écaille blonde incrustées d’or. Réputé pour la qualité de ses objets, il passa à la postérité par la production de tableaux précieux dont la technique reste aujourd’hui mystérieuse. En 1773, il présenta au Roi deux vues du château de Saint-Hubert et obtint le titre de tabletier privilégié du Roi sous Louis XV et sous Louis XVI. Ses thèmes de prédilection sont le plus souvent des vues de villes, de monuments et de châteaux dans des perspectives de parcs ou de paysages animés de petits personnages.
Bibliographie
Jean-Marie Bruson, Françoise Reynaud, Philippe Sorel, Rosine Trogan et Jean-Pierre Willesme, De la place Louis XV à la place de la Concorde, catalogue d’exposition, Paris, Musée Carnavalet, 1982.
Anita Semail, « ces délicats chefs-d’œuvre de la tabletterie au XVIIIe siècle : Les Compigné et leurs créateurs », Plaisir de France n° 427, mars 1975, pl. 2.
Ouvrage collectif, Compigné, peintre et tabletier du Roy, catalogue d’exposition, Grasse, Villa-Musée Jean-Honoré Fragonard, Juin-Juillet 1991.